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Point de vue images de la Coupe de France du Nihon Kendo Kata

Publié le par Jean-Pierre LABRU

Toute la vidéo ici : https://www.facebook.com/IaidoConceptNaples/videos/1519701181377966/

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J'ai arbitré les deux premières éditions de la Coupe de France de Kendo no Kata.

Cette compétition, nouvellement introduite en France à l'initiative de Michel GUENTLEUR, d'ailleurs que je remercie, rassemble les plus fervents amateurs et pratiquants du Nihon Kendo Kata.

Ces pratiquants apprécient de pratiquer les Kata, s'y entraînent sans aucun doute très régulièrement. On le voit dans leur réalisation, ils aiment les Kata.

Et pourtant...

Ne soyons pas provocateur !

Je n'aime pas généraliser, alors on va dire, la majorité d'entre eux... allons, soyons un peu provocateur, titillant ainsi le même ego tranché par leur sabre régulièrement à l'entrainement...

...la grande majorité d'entre eux, d'entre vous en fait...

...vous avez "insuffisamment" compris les Kata !

PAF : la phrase est lancée !  Vous n'avez rien compris aux Kata !!!

Et puis j'ai discuté avec quelques autres arbitres dont j'étais ce jour là, et je me suis rendu compte que nous ne comprenions pas tous les Kata de la même manière. Nous n'avons pas les mêmes attentes en termes de jugement d'une prestation de Kata.

Ma recherche de vérité du combat dans l'expression des Kata, rencontra la recherche d'harmonie d'un de mes confrères, puis l'expression du Ki attendue par un autre arbitre ou encore le respect strict des rôles de Uchidachi et Shidachi.

Et bien voilà, comme je dis souvent à mes élèves quand ils me demandent : "Faut il faire comme untel dit, ou bien comme un autre demande ou bien comme tu nous montres ?"

Ma réponse est invariablement : "Il faut apprendre à tout savoir faire, toutes les façons diverses et variées et c'est de ce fait qu'un jour tu trouveras ta propre façon à toi !"

Le respect des rôles !

Uchidachi, comme très souvent écrit par tous, et par moi dans mon article sur le Motodachi, son rôle est primordial. En fait, c'est le guide, c'est le professeur. Il donne le rythme, la distance, l'attaque correcte et donne ainsi la vie au Kata.

Shidachi est l'élève, celui qui apprend la technique, celui qui suit son guide, qui est à l'écoute de la moindre des vibrations des sourcils de l'Uchidachi. Cette écoute, cette lecture, cette empathie, ces informations captées représentent la base même de la prise de connaissance du contexte si cruciale dans un combat.

Alors comment expliquer lors de la Coupe De France que, systématiquement (je n'ai pas vu d'exception), ce soit le plus expérimenté, le plus gradé, le plus en capacité à s'exprimer correctement qui soit relégué (mot choisi), ...relégué au rôle de Shidachi.

Comment expliquer ? Si ce n'est par une méconnaissance, ou pire, par un manque d'évaluation juste, de l'importance vitale (au sens littéral) du rôle de Uchidachi. 

Je m'insurge donc ! NON au cartésianisme primaire qui tendrait à croire que réussir ses Kata c'est réussir techniquement les oojiwasa du rôle de Shidachi !!!

L'expression du Ki !

Définissez moi ce qu'est le Ki  !  Vous avez 2h...

Je pourrais rester sur cette boutade et ainsi laisser en suspens votre propre interrogation sur ce qu'est le Ki, intensément attendu, ce jour là, par un ou plusieurs des arbitres de la Coupe de France de Kata.

Qu'attendions nous au sujet du Ki ?  oui je m'associe également...

On parle de présence pour un acteur, alliant charisme, expressivité, captivation (néologisme : action de captiver) de son auditoire et communication de son envie, de sa ferveur...

Et bien voilà, une définition du Ki comme de l'ultra-présence, ici et maintenant , déconnecté du passé et du futur, intensément dans l'instant de cette réalisation.

Alors, je vois d'ici, la tentation est grande d'imaginer qu'une prestation d'actor studio pourrait suffire à notre bonheur (celui des arbitres), touchés que nous serions par cette indicible énergie de vie, exprimée lors des Katas. Un numéro d'acteur !

Oui et non, je pense que c'est toute la différence entre faire du cinéma et vivre intensément et véritablement son rôle.

Et nous voici relié au point précédent : le respect des rôles, ainsi qu'au suivant : la recherche de vérité.

La recherche de vérité !

C'est le critère dans lequel je me reconnaissais le plus en ce qui concerne le jugement des Katas.

Pour moi, le Kata, en Kendô, mais pas seulement, est un recueil de situations techniques, provenant de sources historiques ou non, retraçant des combats.

Alors qu'est ce qui exprime la vérité dans la reproduction d'un combat ?

On dit souvent que "c'est l'intention qui compte". Effectivement, un peu dévié de son sens originel, dans notre cas, l'intention fait tout.

Si notre intention est de reproduire fidèlement les gestes attendus : le pied droit ici, la main gauche là, le regard vers ici, le déplacement par là...

A ce moment là, le risque est grand de n'être que dans une réalisation de 8 sur la glace, élégant et raffiné dans une pure expression scénique d'une beauté esthétique épurée.

BEURK ! Cela me fait penser aux danses avec sabre, soit disant sacrées, réalisées par des madame Butterfly toutes endimanchées et à l'attention de touristes en mal de japonaiseries.

Replaçons nous dans le contexte de temps immémoriaux où le Senseï est en train d'enseigner à son disciple, mieux que "comment ne pas en prendre plein la gueule en compét'...", mais plutôt comment affronter une situation réaliste de combat au sabre où le pronostique vital serait réellement engagé.

Pensez vous qu'il faille que l'Uchidachi doive être coulant, permissif, édulcoré ou même conciliant ?!?!?

Bien entendu qu'il ne faut pas forcément estropier son élève dès le premier cours, en lui montrant d'un Men bien senti au bokken lui explosant la fontanelle, qu'il ne sait en fait pas correctement réaliser un suriage !

Et en même temps si l'attaque de Men reste par trop théorique, la technique ne sera jamais assimilée...

Et tout à l'avenant...

Action ou vérité ?!

Voici deux figures du Kata où, à mon goût, l'action ne s'exprime pas suffisamment en vérité.

Ipponme : 

Quand on est Uchidachi et veut faire une belle impression sur l'attaque de Ipponme, souvent, afin de démontrer de la puissance et de l'engagement, on attaque fort avec un fort kiaï...

...et...

...pour ne pas blesser le Shidachi si par mégarde il oubliait de reculer, on coupe devant lui et non ses deux mains, tsuka comprise, comme expressément demandé dans ce Kata.

Question de cible encore : les deux mains de Shidachi, tsuka comprise, et le couper jusqu'au nombril. Trop souvent - même de temps en temps, c'est toujours trop - on a l'impression que le Uchidachi vise les pieds du Shidachi car son corps s'incline déjà vers le bas au début de l'action...

Gohonme :

Le même en couleur ! Ici la cible est la tête. Profondeur de coupe attendue : la tête uniquement.

Là ce n'est pas compliqué, je ne vois jamais l'attaque de l'Uchidachi arriver à la bonne distance. Jamais !  

Enfin, presque jamais mais à tel point que je me déplace systématiquement féliciter le bon Uchidachi pour sa coupe à la bonne distance. (Véridique)

Et ce n'est pas fini, et c'est encore la faute de Uchidachi...

Quand je vous dit qu'il faut qu'il tienne la route, la maison, la distance...

Dans sa trajectoire de coupe, non content de n'être pas à la bonne distance, il vient quasi systématiquement attaquer latéralement le sabre du Shidachi... souvent au niveau de la tsuba, et l'impact intervenant en dessous de la hauteur de la tête ce qui implique également que le timing est inadapté.

Mais pourquoi, au nom de quel pouvoir étrange, sa trajectoire de sabre est déviée de son objectif premier (la tête je vous rappelle) ?

Je pense sincèrement que la cible, tout le monde la connait, mais par manque de concentration, de détermination sur l'action à réaliser, on laisse notre esprit travestir le mouvement en l'adaptant inconsciemment car on sait d'avance ce qu'il va se passer.

Et là, il n'est pas question de niveau. Si on pratique les Kata sans prendre garde à cela, à n'importe quel niveau, on tombe dans ce piège. C'est humain !

Conclusion

S'il fallait une conclusion, ce serait :

Uchidachi : Pratiquez les Katas comme si c'était la première fois, comme si vous ne saviez pas ce qu'il va arriver. Travailler sur vous même pour cela. Cette notion vous servira également en Keiko (Ne pas se laisser influencer par l'autre), en arbitrage (Ne pas se laisser influencer par des a priori) et bien entendu pour le Kata (La recherche de la vérité du combat originel).

Shidachi : Choisissez un bon Uchidachi !

Excuses 

Par ce post, je m'en suis pris amicalement aux amateurs des Kata participants à cette manifestation, la Coupe de France des Katas.

Et imaginez ce qu'il pourrait y avoir à raconter sur ceux qui ne comprennent pas l'utilité des Kata dans la pratique...

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